Nouvelles du jour d’après #5

Le mouvement anarchiste a depuis bien longtemps son lot d’autoritaires
responsables et citoyens. Dans la situation actuelle, la gestion de
crise sanitaire a par conséquent ses relais dans les milieux dits
radicaux, justifiant les attestations de sortie et les mesures
d’isolement au détriment de l’entraide. Il y a des moments propices pour
que les masques tombent. Le site Socialisme libertaire, qui diffuse des
contenus variés et de tendances fort contradictoires, a ainsi trouvé que
c’était le bon moment pour diffuser un vieux texte de Pierre Bance,
apôtre acritique sur le Rojava et du municipalisme libertaire en France,
où il est question de Droit, de Justice et de Police libertaires. Le
titre est évocateur : Maintien de l’ordre en anarchie. “Ainsi
faudrait-il qu’en société communiste, il y ait un droit, s’indigne le
naïf. Un droit mais aussi une justice et une police pour le faire
appliquer.” J’ajoute : à coups sûrs il y aura aussi des anarchistes et
des rebelles pour les combattre, et c’est tant mieux. Kropotkine avait
écrit un texte sur L’organisation de la vindicte appelée justice il y a
bien longtemps (https://infokiosques.net/spip.php?article1376). Les
frères de la forêt combattant le tsarisme ont quant à eux refuser la
discipline. Après avoir élu un chef, puis pris les décisions
collectivement à la majorité, ils ont finalement décidé de ne rien
décider pour les autres. Les décisions collectives ne s’imposaient
jamais à qui que ce soit et tout un chacun pouvait refuser de s’y plier.
Se replonger dans cette histoire (cf Vive la révolution, à bas la
démocratie, Mutines séditions), comme beaucoup d’autres, serait plus
judicieux que d’apposer les oripeaux libertaires sur des institutions
autoritaires et étatiques. A leur maintien de l’ordre, quel qu’il soit,
il y aura toujours des individus pour y opposer la conflictualité contre
toute domination.
La peur est rarement bonne conseillère. L’isolement n’ouvre aucune
perspective émancipatrice. La crise dans laquelle nous sommes plongés
n’est pourtant pas une crise sanitaire provenant d’un virus arrivé là
par hasard de façon toute naturelle. C’est une crise aux multiples
facettes qui est d’abord celle d’un monde absurde, cynique, inégalitaire
et liberticide. Et par la même occasion ravageur pour tout ce qu’il y a
de vivant. Les choses sont claires : les cadres télétravaillent pendant
que les ouvriers et ouvrières taffent et s’exposent à la maladie (dont
le coronavirus n’est qu’un aspect plus immédiat) ; les sans-papiers et
sans-abris sont “oubliés” ; le gouvernement commence déjà à profiter de
la situation pour renforcer les conditions d’exploitation à la demande
du patronat et pour accélérer une société de contrôle toujours plus
technologisée, etc. Il y aurait par ailleurs beaucoup à dire et
réfléchir sur la question du rapport à la mort et à ce qui fait une vie
plutôt que rester “confiné” à la survie. Peut-on seulement affirmer
qu’on préfère continuer à vivre et à lutter au risque de sa santé plutôt
que de s’isoler à ne rien faire pour peut-être y passer quand même ? Il
serait idiot de nier la gravité de la catastrophe en cours. Il y a
d’ores et déjà des tas de morts, et il y en aura d’autres. Il faudra y
ajouter les tas de gens qui ne pourront pas payer leurs factures et qui
se retrouveront dans des situations de merde, des gens traumatisés, des
gens embastillés. Il est toutefois certain que la révolte et l’entraide
ont bien des vertus thérapeutiques !

Encore et toujours pour la liberté !